Fabriquer des milieux vivants

- un carnet de l'Aide à la jeunesse de Saki Kogure avec le Foyer l’Aubépine

Les êtres humains ont besoin d’autres humains pour se soigner

Dialogue avec Martin, éducateur

Saki : Martin, tu as été un responsable du projet #Chacun sa yourte. C’est un projet déployé en partenariat avec l’AMO Le Cercle et l’Aubépine. Il s’agit d’un stage d’une semaine, dans la yourte du Foyer l’Aubépine, pour des jeunes déscolarisés. Tu as travaillé à l’AMO pour ce projet et puis, maintenant, tu viens d’être engagé en tant qu’éducateur à l’Aubépine. Tu disais la fois passée, dans une camionnette, que tu voulais changer quelque chose dans le fonctionnement du projet Yourte.

Martin : Oui, parce qu’avant il y avait un côté plus scolaire, un peu froid, paternaliste, qui faisait qu’au niveau des groupes des jeunes on n’arrivait pas toujours à trouver des pistes d’action pendant la semaine. Il faut dire aussi que parfois on entrait en désaccord avec les jeunes. J’ai essayé d’apaiser, de modifier pour justement ne plus laisser de frontières et essayer d’ouvrir au maximum.

Saki : Pourrais-tu me présenter une semaine de stage pour qu’on puisse mieux voir la façon dont tu t’y es engagé et dont tu as apporté les changements que tu viens de mentionner ?

Martin : Bien sûr. Lundi, on marche. On démarre à Ciney et on fait une vingtaine de kilomètres. Donc on va jusqu’à Havelange, jusqu’à la yourte de l’Aubépine. L’axe principal, c’est la rencontre. On se rencontre entre nous, entre jeunes, entre travailleurs et sur le chemin on s’arrête chez ma copine Cécile, on va boire un café, on va chercher un sandwich, ceux qui veulent acheter une cigarette ou un coca, hop, c’est l’occasion !

Saki : J’ai beaucoup aimé marcher avec toi, Stéphanie et les jeunes. Les jeunes viennent de Ciney, Namur, Dinant. Ils ne viennent pas de la même ville, ni de la même école. Partager le même paysage, ça peut faciliter notre rencontre. Aussi, marcher ensemble une vingtaine de kilomètres, ce n’est pas rien. Quand on est arrivés au Foyer l’Aubépine, on était tout fiers. Et c’est avec cette fierté qu’on a pu démarrer l’atelier.

Martin : Quand on arrive à la yourte avec cette fierté, on propose tout d’abord aux jeunes de travailler sur la question des règles. Il s’agit de créer un règlement intérieur propre à la yourte, règlement à respecter par l’ensemble du groupe.

Saki : Les jeunes, ils en ont marre des règles à l’école et dans la famille parce qu’ils ne savent pas pourquoi ça existe…

Martin : Il s’agit de vraiment dialoguer sur la notion de règle en général, mais aussi sur la règle implicite et explicite. La question est de savoir si c’est pertinent ou pas d’avoir des règles au quotidien, dans la famille, à l’école, entre potes, peu importe.

Saki : Le fait de discuter et décider ensemble les règles à respecter rend possible la création d’un cadre valorisant et pas imposé. Ça permet d’être en accord avec les règles que le groupe a créées par lui-même. Ça aide aussi à commencer la semaine à la yourte dans un cadre sécurisant.

Martin : Tout à fait. Pour avancer un peu, j’ai envie de dire que, le mardi matin, on a un atelier qui s’appelle le cube. On imagine que l’être humain est un cube et qu’il a plusieurs facettes. Dans ces facettes, si on prend l’exemple d’un jeune, souvent c’est l’école, le hobby, la famille, les potes, je ne sais pas, ça pourrait être le chien, ça pourrait être n’importe quoi… Vraiment les six facettes du cube ont une importance pour le jeune.

Saki : C’est pour comprendre les besoins des jeunes ?

Martin : Ça c’est ce qu’on appelle dans l’ensemble de l’exercice, une SCI, c’est-à-dire une situation concrète insatisfaisante : dans chacune des facettes il y a quelque chose qui est inaccompli, il y a quelque chose qui foire. Le but, c’est de mettre le doigt sur ce qui coince et de trouver des solutions.

Saki : Et le sens de le faire en groupe… Tu y vois un sens particulier ? Parce que souvent, vous travaillez à quatre ou à cinq.

Martin : En fait, c’est vraiment de s’entraider, c’est d’amener un maximum d’idées et un maximum d’histoires différentes. Le but, c’est que les jeunes passent une semaine ensemble et qu’ils puissent discuter de tout et de rien ensemble.

Saki : Passer du temps ensemble, se détendre… Vous faites quoi ensuite ?

Martin : Le mardi après-midi, on fait de la pêche à l’aimant. Le but est de nettoyer les cours d’eau avec des gros aimants au bout d’une corde. C’est le geste écolo de la semaine et, en même temps, c’est aussi un moment informel. On va barboter dans l’eau, on tombe dedans, on fait des petits paris, celui qui va couler le premier. Le but c’est de vraiment avoir un moment informel pour les jeunes et de se détendre.

Saki : C’est aussi symbolique de faire du nettoyage dans une eau qui coule.

Martin : Je ne vais pas parler de chasse aux trésors, mais de pouvoir se dire « tiens, moi j’ai trouvé un clou, et moi une capsule, et moi une grenade ».

Saki : On peut être fier d’avoir trouvé un clou.

Martin : Oui c’est ça, à fond. Il y a un rapport à la fierté. La fierté, on peut la voir partout.

Saki : Comment vous organisez-vous le mercredi, après avoir trouvé ces objet-trésors dans le cours de l’eau ?

Martin : Le mercredi matin, on revient ici à la yourte. C’est un moment très solennel pendant la semaine. C’est le moment où on rencontre les écoles.

Saki : Et ça marche ? Ou bien ça reste difficile ?

Martin : Moi je trouve que ça marche. C’est vraiment dire aux jeunes que, ici, ce n’est pas une rencontre avec l’éducateur de l’école, c’est une rencontre avec Nicolas qui vient près de toi, qui vient pour te parler de l’école, mais dans un autre cadre.

Saki : C’est intéressant que ce soit l’éducateur qui se déplace dans la yourte. C’est comme si la forme même de la rencontre changeait. Ce n’est plus la casquette d’éducateur qui est la plus importante, c’est autre chose. Il s’agit d’une rencontre entre deux personnes.

Martin : Oui c’est ça.

Saki : Et les jeunes arrivent à s’exprimer assez franchement ?

Martin : Oui. C’est au fur et à mesure de la discussion que ça vient. C’est un moment de libre-échange. Je favorise et valorise ce côté «ne te tracasse pas, on est ici pour discuter de tout et de rien ». C’est un moment tranquille, posé, on ne se prend pas la tête et où on peut se dire les choses, mais en dehors du cadre de l’école. Et ça je trouve que c’est intéressant.

Saki  : Et le jeudi ?

Martin : Alors, le jeudi, ils vont en immersion. Le mardi matin, je donne à chacun une feuille avec des partenaires d’immersion, des personnes chez qui ils pourront passer la journée du jeudi. Ces personnes sont des indépendants, des travailleurs. Ça va de l’enseignante maternelle en passant par la cuisinière, le maçon, le mécanicien… Il y a vraiment tout et n’importe quoi.

Saki : Ce sont tes contacts à toi ?

Martin : Ce sont des personnes que je connais. Ce sont des amis, des connaissances, des gens à qui j’ai déjà fait appel pour diverses choses. Je veux dire, il y a mon mécanicien, mon carrossier, il y a ma maman, il y a une dame qui cuisinait quand j’étais petit, il y a l’école qui accueille les jeunes, tous les maçons ce sont des amis à moi. Il y a aussi deux ou trois mécanos en plus, mais qui sont toujours des amis. Ils ont tous un petit lien avec moi.

Saki : Ça c’est important.

Martin : C’est très important, aussi bien pour moi que pour les jeunes. Le but, ce n’est pas ce que, moi, je mets en avant dans la journée d’immersion, ce n’est pas seulement la découverte d’un métier. C’est plus la découverte des personnes, c’est apprendre à créer du lien social avec des personnes qu’on ne connaît pas et aborder la dimension du travail.

Ce qui est assez chouette avec ces journées d’immersion, c’est que les jeunes ont l’opportunité de se mettre en valeur, parce qu’ils n’ont pas l’habitude d’entendre des choses très positives à leur égard, que ce soit dans leur scolarité, avec leurs potes, avec leurs familles, peu importe. C’est le fait de se dire, tiens, là j’ai l’occasion de montrer qui je suis et ce dont je suis capable. Au-delà de la journée d’immersion, ça leur ouvre des portes pour la suite. La plupart des jeunes se plaignent qu’ils ne savent pas ce qu’ils veulent faire, qu’ils sont paumés, mais ils ne font rien pour savoir ce qu’ils veulent faire. C’est normal aussi parce que la société, à l’heure actuelle, n’est pas valorisante et aidante, elle stagne.

Saki : Les jeunes qui n’aiment pas la façon dont l’école fonctionne retrouvent peut-être du plaisir à entrer en contact avec des métiers comme le maçon, l’électromécanicien. Mais ce qui est aussi important, c’est la manière dont on fait du lien social. Du coup, il y a un rapport aux potes, mais aussi aux adultes qui peuvent t’apprendre quelque chose. Je me souviens d’un garçon qui n’habitait pas avec son père : il était privé de cette figure paternelle. Or lui, ce garçon, il pouvait passer du temps avec des ouvriers, par exemple des électromécaniciens, ce qui est intéressant pour construire son image de soi-même.

Martin : Oui le fait de se retrouver toute une journée avec des électriciens, avoir une autre image de l’homme, je pense que c’est pertinent et, au-delà de ça aussi, la rencontre sociale c’est ce qui me semble le plus intéressant et le plus important. Mais c’est aussi se rendre compte un peu de la notion d’hiérarchie, parce qu’effectivement ce qui pose problème aux jeunes, c’est de se rendre compte qu’on a toujours une autorité supérieure au-dessus de nous. Les gamins sont peut-être chauds patates, ils sont peut-être motivés, mais ils doivent obéir à ce qu’on leur dit.

Saki : Les jeunes peuvent apprendre que toutes les autorités ne sont pas mauvaises. Par rapport à un tel mécanicien qui a travaillé 20 ans là-bas, qui fait un super travail, qui est un très bon artisan, on ressent du respect et donc on accepte son autorité. Or beaucoup de jeunes ont du mal à accepter l’autorité de leurs pères violents, par exemple. Mais alors dans les cas que tu mentionnes, il y a à la fois une certaine autorité et la dimension de la personne. Ces deux dimensions se croisent.

Martin : Effectivement, la plupart des gens chez qui je mets les jeunes, ce sont des connaissances à moi, mais ce sont aussi des gens qui ont une histoire de vie, qui pour certains est plus triste que pour d’autres.

Saki : Donc en fait ce que tu fais, c’est inviter ces jeunes dans ton réseau social.

Martin : Je pense que l’être humain, pour se soigner, a besoin d’un autre être humain. Et beaucoup de ces jeunes-là, au niveau des êtres humains qui les côtoient, ce sont quand même des êtres humains qui ont une position supérieure à eux. Se retrouver parfois devant d’autres humains qui se mettent à leur place, qui savent se mettre à la même hauteur qu’eux, qui peuvent s’adapter à une position plus haute ou plus basse, c’est ce qu’il leur faut. C’est vraiment de se dire « tiens, plus je rencontre des gens, plus j’apprends sur moi-même ».

Saki : Je voulais te demander si tu as une expérience qui t’a vraiment frappé dans la rencontre avec un jeune ?

Martin : Oui. Un jeune qui m’a fait mal au cœur parce qu’il était dans une situation injuste. Ce gamin, on m’a appelé pour aller à sa rencontre. Il venait de péter un câble, il avait retourné son banc et éclaté la tronche d’un jeune de sa classe. D’un coup de poing… Il a été assez violent. Quand j’ai su y aller, la préfète de discipline a trouvé que ce serait peut-être intéressant qu’il participe au projet de la Yourte, parce qu’il ne faisait plus rien à l’école, il ne s’investissait plus du tout. Et quand j’ai été à la rencontre du gamin, j’ai été là… wow, ça avait l’air chaud ! En discutant un peu avec ce gamin, quand j’ai pu le connaître un peu plus pendant la semaine, je me suis rendu compte que le gamin depuis trois ans… J’ai beaucoup de mal avec le mot « harcèlement » parce qu’on l’utilise souvent à l’heure actuelle pour dire tout, mais, dans sa situation – il vivait vraiment le harcèlement au quotidien. Et un jour il a complètement explosé.

Saki : La réaction du jeune est tout à fait normale. Mais ce que ce jeune a vécu, ce n’est pas normal.

Martin : Et de discuter avec lui était vraiment touchant, parce que ce gamin avait un objectif, faire carrière dans l’agriculture, faire du transport de terre, de betteraves… Et donc le gamin, en plein milieu de la semaine, sa maman me sonne et me dit « Monsieur, je suis un peu embêtée parce que je viens de recevoir la lettre de la préfète de discipline comme quoi il avait 5 jours de renvoi pour son truc ». Elle m’apporte la lettre. Le jeudi, je rencontre la préfète de discipline, avec son éducatrice. Je suis là avec la lettre et je leur dis « Vous trouvez ça normal ? ». La préfète me dit « Je n’étais pas au courant… ». Elle me dit qu’elle a sanctionné parce que le directeur lui a demandé de le faire. Mais elle n’était absolument pas au courant du renvoi. Vraiment, elle était mal à l’aise. Je lui ai dit que j’allais essayer de trouver une solution avant la fin de la semaine. Le lundi, je mets le gamin en immersion ici chez un ami qui fait des montages des pneus pour machines agricoles. Il a passé une journée tip-top, mon pote a dit « Franchement, il n’est pas de la région, mais je voulais l’engager directement ; il bosse nickel, il voit clair nickel, il s’est super bien plu ». Et le gamin m’a sonné pour rester deux heures en plus… Fin de semaine, je rencontre le jeune avec sa maman, je renvoie un peu ce qui s’est passé. Et justement, pendant l’entretien, la préfète de discipline m’a appelé. Je lui dis que j’ai la maman en face de moi, avant de demander ensuite comment on envisage que le jeune rentre le lundi. Elle me dit « Écoutez, au vu des 5 jours, je pense que ce n’est pas envisageable qu’il rentre lundi ». Je m’étonne : « Ce n’est pas envisageable ? Pourquoi ? ». Elle répond : « Vous comprenez bien notre position, c’est quand même plus simple de virer un élève que d’en punir 7 autres ». Je dis : « Pardon ?! ». Elle continue : « Bah oui, parce que quand même, dans les 7 autres, il y a quand même trois grosses familles de la région, on a beaucoup d’enfants, leurs parents ont déjà fait beaucoup d’études chez nous… ».

Saki : C’est très injuste et honteux.

Martin : Et, au final, c’était nickel, parce que le gamin a changé d’école, c’est ce qu’il lui fallait. Mais c’est le fait de me dire « Putain, une école me dit ça ! Mais c’est honteux quoi ! ». Et la préfète de discipline, qui était quand même une préfète qui avait une image et une manière de voir les choses très différentes…, ne faisait qu’appliquer ce que la direction disait ! Et elle en avait mal parce qu’elle m’a dit « Moi je vous relate ce que la direction n’ose pas vous dire ». J’ai reçu des nouvelles du gamin deux ou trois semaines après et il m’a dit « Là, je revis, je suis enchanté, je profite à fond, merci ». Et donc ça m’a vraiment touché. Je vois le gamin qui vit une injustice, j’essaie de la combattre, mais l’injustice est trop forte. Ça c’était une situation…

Saki : Ce garçon et toi, vous étiez courageux. Et ton intervention était vraiment utile pour la vie de ce garçon, puisque non seulement il a pu changer l’école, mais surtout il a pu voir que ce ne sont pas tous les adultes qui sont injustes envers lui. Il y a aussi un adulte qui sait agir correctement pour le jeune. Tu as sauvé sa capacité d’avoir confiance en les autres. Quand j’ai participé au stage, j’ai aussi vu que ton attitude envers les jeunes était un modèle que les jeunes cherchent pour se construire. Ton attitude n’était pas supérieure, au contraire, tu étais même amical. Mais en étant sincère envers les jeunes, tu as montré un modèle de l’adulte sur qui les jeunes peuvent compter.

Martin : Oui, je l’espère.

Saki : Tu veux bien me raconter ton horaire le vendredi ?

Martin : On fait un atelier « La rédaction dont on est fier ». C’est vraiment trouver une rédaction dont on peut retirer de la fierté. Et on trouve deux qualités par rapport à ce qu’on a fait. Ça peut être j’ai aidé une grand-mère à traverser le passage piéton, j’ai réalisé une super figure avec mon BMX, j’ai réalisé un gâteau sabayon. Après, avec l’ensemble du groupe, on trouve d’autres qualités. Et donc la journée de vendredi c’est la journée de clôture. Et c’est la journée où je mets l’accent sur le positif à fond.

Saki : Toi, tu as parlé de tes expériences très personnelles aux jeunes. Souvent, les meilleurs travailleurs sociaux sont ceux qui sont engagés personnellement dans leur travail.

Martin : Dans le cadre du projet Yourte, vu que les jeunes n’y sont pas pour longtemps, mon but c’est de créer un maximum de confiance. Je prends ce que dit François « Faire la parité entre un travailleur social et la personne qu’on est, c’est très difficile parce que dans les deux cadres, c’est le même cœur qui bat ». Et donc je pense qu’il est important de pouvoir apporter sa sensibilité qui est dans les deux, le métier et la personne qu’on est. Et vraiment de se dire « On peut parler de soi, on peut exprimer ce qu’on a vécu avec des jeunes dans le cadre de notre métier, tout en y mettant les formes et les limites qu’on a envie de se fixer ». Moi je n’hésite pas à parler de ma situation familiale, mais avec mes mots et à ma manière. Je ne vais pas commencer à expliquer de long en large ce qui s’est passé. Juste assez que pour se dire « Tiens, toi qui as vécu peut-être quelque chose de similaire, tu te dis bah le mec est devant toi et il peut comprendre, il peut entendre. Bah, tiens, on est pareils ».

Saki : Et ça leur permet aussi de parler de leur vécu…

Martin : Je pense que oui. Ça permet de s’ouvrir, de s’exprimer.

Saki : Je voulais te demander comment ça se passe le partenariat avec l’Aubépine ? Le fait que tu ne réalises pas ce travail dans le bâtiment de l’AMO, mais que tu es venu ici à l’Aubépine, ça change quelque chose ?

Martin : On aurait pu rester à l’AMO et rester à Ciney. Mais je trouve que la rencontre avec les autres, ça permet d’élargir le champ des jeunes pour voir d’autres choses.

Saki : Pourquoi à ton avis le projet s’appelle « Chacun sa yourte » ?

Martin : Parce que chacun construit sa yourte. C’est symbolique. La yourte, ça vient quand même des régions froides, de la Russie et des régions où les gens sont nomades. Et donc on plante une yourte pendant un mois pour la chasse, puis on déplace sa yourte pendant deux mois parce que le temps est si froid qu’on ne sait pas vivre en telle partie, en tel endroit de la Russie. Et c’est vraiment cette image qu’on essaie de mettre : on bâtit chacun sa petite yourte, on la déplace.

Saki : Et c’est aussi une résidence, la yourte.

Martin : La yourte c’est une tente, c’est là où on vit. Oui c’est un lieu de résidence.

Saki : Un lieu de résidence qui bouge pour voyager.

Martin : Et donc c’est ce qu’on essaie d’inculquer aux jeunes pendant toute la semaine. Si on prend l’image de la yourte et on la transpose sur le jeune, c’est : « Toi, tu as ta vie, bah on va te permettre de la déplacer un peu pour voir autre chose et te dire qu’il n’y a rien de fixe ». Je veux dire : si quelqu’un a envie d’être mécanicien, c’est ok, mais rien ne l’empêche de dire bonjour à un carreleur. Ça c’est un exemple du métier, mais ça peut être aussi l’exemple de la famille. Il y a moyen de faire plein de rencontres, avec plein de gens, pour élargir les possibilités en se baladant, en voyant des gens, en rencontrant d’autres personnes.

Saki : Maintenant tu travailles à l’Aubépine jusqu’à la fin du mois de juin. Toi, tu ressens comment cette transition ? Parce qu’il y avait quand même une transition entre ton travail précédent et l’Aubépine ?

Martin : Disons que c’était intéressant que je revienne ici parce que j’y ai travaillé déjà pendant le premier confinement. Mon expérience dans la petite enfance est aussi un plus. J’ai retrouvé à l’Aubépine une fillette accueillie dans mon ancien lieu de travail. Cela fait sens, car il y a une continuité. Mon expérience en AMO m’aide également dans ma pratique avec les jeunes du SRG.

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